La Loire a brillé aux Jeux olympiques de la boucherie
Fin mars, Paris accueillait l’édition 2025 des championnats du monde de la boucherie artisanale, portés par la Confédération française de la boucherie. Des professionnels de notre région ont pris part à l’organisation et aux épreuves, où certains ont obtenu des médailles. Récit d’une aventure collective.

« C’était vraiment top ! Nous n’en croyions pas nos yeux et nos oreilles ! » Quelques jours après la remise des prix du World Butchers Challenge, Jean-Luc Brise, boucher roannais et membre de la Confédération française de la boucherie, boucherie-charcuterie, traiteurs (CFBCT), n’en revenait toujours pas que la France soit championne du monde et qu’un apprenti étudiant au CFA de Mably ait aussi reçu une médaille d’or en individuel.
Cette compétition est née en 2011, mais a pris sa dénomination actuelle de World Butchers Challenge en 2016, alors que la France y participe pour la première fois et remporte de titre de championne du monde. Le fils de Jean-Luc Brise faisait d’ailleurs partie de l’équipe. Après l’édition de 2022 aux Etats-Unis, la CFBCT s’était positionnée pour organiser l’événement en 2025. Jean-Luc Brise a donc travaillé pendant deux ans et demi sur ce projet visant à mettre en valeur la boucherie artisanale et à favoriser les échanges entre les pays.
En étant membre de la confédération, il a pu vivre la compétition de l’intérieur, ou presque… Au parc des expositions de Versailles, dimanche 30 et lundi 31 mars, il était aux premières loges dans les gradins qui entouraient le plateau central où travaillaient les candidats. « On ne voyait pas tout ce que les bouchers faisaient car nous étions quand même loin. Quand on les regardait œuvrer, en individuel ou en équipe, on comprenait que tout était millimétré. Ce sont de véritables robots. Ils pourraient travailler les yeux fermés. »
Une fois les épreuves terminées, le Roannais a eu la possibilité d’approcher, « mais c’était difficile de savoir si les Français avaient bien travaillé ou pas et quelle place ils auraient, d’autant plus que le plateau représente que 10 % de la note finale. » Celle-ci porte aussi sur la technique, l’homogénéité, la propreté, la tenue vestimentaire, l’utilisation des EPI (Equipements de protection individuelle) … « Une chose est sûre, lorsque l’équipe de France a allumé les leds de son plateau, c’était magnifique. C’était le plus beau plateau…, mais c’est peut-être chauvin ! »

Pendant les préparatifs et la compétition, « nous avons pu apprécier le véritable esprit d’équipe, rapporte Jean-Luc Brise. Nous les avons sentis sereins. C’était particulièrement vrai pour le jeune candidat roannais, Nino Candela (lire ici) : il était cool, il a déroulé le travail qu’il avait à faire, il a même terminé 20 minutes avant la fin et en a profité pour fignoler son plateau. »
Alors que les épreuves individuelles pour les apprentis et les jeunes bouchers se déroulaient le dimanche, celles en équipe étaient le lundi. Il a fallu attendre le mardi soir et la remise des prix au Paradis Latin pour connaître les résultats. « Plus de 600 personnes étaient présentes. C’était une très belle réception », rapporte Jean-Luc Brise. Les discours ont précédé le spectacle. « L’ambiance et le suspens sont ensuite progressivement montés pour arriver jusqu’au Graal final : le sacre de l’équipe de France. Ce n’était que du bonheur. Chaque vainqueur individuel a aussi eu droit à sa Marseillaise. Nous avons vécu un moment extraordinaire. »
Une équipe entraînée
L’équipe de France est composée de compétiteurs, bien évidemment, mais aussi d’un staff engagé (par exemple un coach sportif). Sans oublier le capitaine, Christophe Ip Yan Fat, originaire de Haute-Loire, meilleur ouvrier de France et membre de l’équipe France ayant participé aux championnats du monde à Sacramento (Etats-Unis) en 2022. « Il a une sacrée expérience des concours », commente Jean-Luc Brise. Mickaël Chabanon et Sébastien Coirier sont les co-capitaines. « Ce sont tous des Meilleurs ouvriers de France. » A noter que plusieurs membres de l’équipe nationale sont issus d’Auvergne-Rhône-Alpes.
Pendant toute l’année qui a précédé le concours, ils se retrouvaient toutes les deux semaines à l’Ecole supérieure nationale des métiers de la viande, le dimanche, et parfois le lundi. « Nous n’avons rien su de leur préparation, affirme Jean-Luc Brise. Tout se faisait à huis clos ; nous n’avions pas le droit d’entrer. Ils se sont entraînés de longues heures, avec acharnement. Ils ont travaillé leurs points faibles, ce qui a payé. Ils ont tous été à la hauteur. »
Le World Butchers Challenge a été très médiatisé et les champions français sont très sollicités depuis leur sacre. « C’est une belle carte de visite pour un jeune boucher. Des futurs ou des jeunes bouchers pourront s’identifier à eux. Une telle compétition offre une image valorisante de la boucherie. Elle renforce l’image que nous souhaitons renvoyer de notre métier et conforte la démarche d’inscription des savoir-faire de la découpe bouchère à la française au patrimoine culturel immatériel national, approuvée en novembre 2024. Et il ne faut pas oublier que le boucher est le prolongement de l’activité de l’éleveur. »
Le World Butchers Challenge en quelques chiffres
L’édition 2025 du championnat du monde de la boucherie, qui se déroulait fin mars à Paris, accueillait 150 candidats (individuels et en équipe) venant de seize pays. Cette compétition accueille trois concours en un :
- un individuel dit « apprentis bouchers », dédié aux moins de 30 ans ;
- un autre en individuel appelé « jeunes bouchers » pour les moins de 35 ans ;
- une équipe nationale composée de six candidats et de deux remplaçants.
Des prix supplémentaires sont attribués : meilleur produit viande bovine, porc, agneau ou poulet, ou encore saucisses.
La matinée du dimanche 30 mars était dédiée à la compétition pour la catégorie « apprentis bouchers » (durée de 2,5 heures) et l’après-midi pour la catégorie « jeunes bouchers » (2,5 heures). Les équipes concourraient le lundi. L’épreuve a duré 3,5 heures. Les résultats ont été proclamés que le mardi soir. En individuel ou en équipe, les candidats doivent préparer un plateau de produits à partir d’un demi bœuf, d’un agneau, d’un demi porc et de cinq volailles. Toute la marchandise doit être valorisée. Un prix récompense d’ailleurs le non-gâchis. Cinq tonnes de viande ont été nécessaires à la compétition. Elle a ensuite été cuisinée par la confrérie Les disciples d’Auguste Escoffier (association créée en 1954, regroupant des gastronomes du monde entier, dont 7 000 chefs) et offerte à des associations caritatives.
Les membres de la Confédération française de la boucherie avaient pour mission d’organiser la compétition, mais aussi de recevoir les équipes quelques jours auparavant et de leur proposer quelques visites : élevages de bovins et de volailles de Bresse, usine de fabrication de steaks hachés Bigard (partenaire de la compétition), stade de rugby de Bourg-en-Bresse, marché de Rungis, boucheries parisiennes.