1840-1945
À l’origine de la structuration du progrès agricole
Dans un contexte de lentes mutations, la paysannerie française évolue dans de nombreux domaines. Entre les avancées techniques, le mode de travail, l’intégration des paysans et de leurs épouses au vote ou encore la gestion d’un conflit mondial et de ses conséquences, il faut s’adapter !
Majoritairement paysanne, la France de la monarchie de Juillet (1830-1848), de la Deuxième République (1848-1852) et du Second Empire (1852-1870) connaît des progrès agricoles conséquents (culture du blé, du maïs et de la betterave à sucre ; mécanisation de plus en plus répandue (machines à vapeur, locomobiles), amélioration des revenus, etc.). Si en 1866, la population rurale française représente 69,5 %, une nouvelle réalité entre en scène : l’exode rural. Les moins qualifiés sont attirés en ville par les grands travaux urbains et ferroviaires. Un phénomène qui avantage « ceux qui restent », entre diminution du chômage, augmentation des salaires et accès facilité à la propriété.
Le XIXe siècle est aussi celui de l’industrialisation, dans lequel le monde paysan est de plus en plus confronté à un espace urbain toujours plus impliqué dans le développement d’une agriculture commerciale, et non seulement vivrière. Dans toutes les régions rurales, les cafés et auberges accueillent ceux qui ont le droit de vote. Et depuis peu, les paysans l’ont obtenu (au lendemain de la Révolution de 1848, NDLR), devenant des citoyens actifs !
Une naissance complexe et controversée
S’il faut attendre le 3 janvier 1924 pour que naissent les Chambres d’agriculture, le début du processus menant à leur fondation remonte à 1840. Cette année-là, le député de la Dordogne, le maréchal Thomas-Robert Bugeaud, est l’un des grands artisans d’une proposition de loi visant à la création des Chambres d’agriculture. Malgré de nombreuses tentatives et interventions en faveur de cette loi, elle est toutefois avortée.
Les 20 et 25 mars 1851, une loi réorganisant les comices et les chargeant d’élire les membres des chambres départementales d’agriculture est votée. Le rôle de ces « chambres » est d’officier en tant qu’assemblées consultatives ; elles ont pour objectif d’éclairer le gouvernement sur des questions de législation, d’économie et de statistique. Là encore, un nouvel écueil se dresse sur la route : le 25 mars 1852, un décret-loi leur enlève cette attribution, donnant alors au préfet le droit de désigner les membres de la Chambre d’agriculture.
Dans la continuité de ces rapports et propositions de loi non concluants, une trentaine d’autres sont déposés entre 1870 et 1914. Aucun n’aboutit, signe de profonds désaccords concernant le projet d’institutions consulaires agricoles. Pourtant, la Première Guerre mondiale marque un tournant décisif.
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Les pouvoirs publics s’évertuent à trouver un moyen pour représenter officiellement l’agriculture française. Ceci dans le but premier de conduire des plans d’ampleur de relance à l’échelle du pays. Plusieurs lois se succèdent (6 janvier et 25 octobre 1919, 30 mars 1920 et 5 décembre 1922, entre autres) pour être finalement abrogées. Le 3 janvier 1924 est votée la loi qui sera ensuite nommée « Charte organique des chambres d’agriculture », sur proposition de Joseph Faure, alors sénateur de Corrèze.
Cette loi marque un véritable temps fort de la naissance des chambres d’agriculture. Celles-ci sont alors décrites comme « des organes consultatifs et professionnels des intérêts agricoles de leur circonscription pouvant sur leur territoire, créer ou subventionner tous établissements, institutions ou services d’utilité agricole, toute entreprise collective d’intérêts agricoles. » Les Chambres d’agriculture voient donc le jour sous la forme de collèges de paysans élus qui doivent permettre l’application des réformes nationales dans les départements et notamment d’accompagner le remembrement des terres agricoles.
Durant trois ans (1924-1927), les Chambres d’agriculture attendent l’organisation d’élections ; il faudra attendre le vote de la loi de finances du 27 décembre 1927 pour voir celles-ci dotées de fonds nécessaires à leur existence, conditionnée à une représentativité départementale. Les présidents des 75 départements se réunissent alors à Paris au sein d’une assemblée permanente officieuse (qui prend la forme d’un syndicat professionnel en mars 1932, NDLR) pour confronter leurs difficultés et prendre des décisions coordonnées. Cette même année, les chambres se dotent d’une représentation nationale, l’Assemblée permanente des Chambres d’agriculture (APCA).
Création et développement de la Chambre d'agriculture dans la Loire
Après l’adoption de la loi instituant la création des Chambres d’agriculture régionales et départementales, celle de la Loire est instaurée officiellement à la préfecture de Saint-Étienne, le 31 mars 1927. La structure est alors située au 8 place de l’Hôtel-de-Ville, à Saint-Étienne. Felix Garcin devient son premier président, de 1927 à 1943 (découvrir son portrait ici). Dans son organisation interne, douze élus sont présents lors des diverses sessions.
Parmi les nombreuses activités de la Chambre lors du premier mandat de son président : amélioration de la culture fruitière en 1931 ; approbation de la taxe sur le blé votée par le gouvernement en 1933 ; création d’un comité interprofessionnel pour la défense du marché du blé.
Le 21 mai 1943, année de sa fin de mandat, la Chambre tient sa dernière session avant sa mise en sommeil… avant d’en sortir, le 13 mai 1949.
Axel Poulain
Repères historiques 1840-1945
- 1840 : proposition de loi (finalement avortée) visant à la création des Chambres d’agriculture, par le maréchal Bugeaud
- 1851 : deux lois réorganisent les comices et les chargent d’élire les membres des chambres départementales d’agriculture
- 1924 : promulgation de la loi de création des Chambres d’agriculture, le 3 janvier
- 1927 : le 27 décembre est votée la loi de finances permettant à chaque chambre consulaire de fonctionner au niveau de chaque département français
- 1936 (puis 1940) : création de l’Onib (Office national interprofessionnel du blé), puis Onic, pour stabiliser le marché du blé (puis des céréales plus globalement) à la suite de la crise de 1929 survenue aux États-Unis et impactant l’économie mondiale.