La colère des agriculteurs de la Loire a grondé lundi et mardi soir, à l’appel du réseau FDSEA-JA. Phares et gyrophares des nombreux tracteurs ont allumé es rues des villes sous-préfectures et préfecture du département symbolisaient leur mécontentement.
Il est à peine 20 heures en ce mardi 19 novembre à l’étang de Savigneux, aux portes de Montbrison. Une vingtaine d’agriculteurs est déjà là, avec environ dix tracteurs, les gyrophares allumés. Les motards de la gendarmerie sont présents, ils affinent les derniers détails de la soirée avec les responsables de la mobilisation issus des rangs de la FDSEA et de Jeunes agriculteurs de la Loire. Au loin, des klaxons se font entendre et des lumières clignotantes se distinguent. Le flux de tracteurs est quasiment incessant pendant une vingtaine de minutes. Où les mettre ? Des manifestants s’improvisent agents de la circulation. L’ampleur de la mobilisation surprend.
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20h20. Les tracteurs quittent le site. Le convoi de 53 tracteurs prend la direction de la sous-préfecture, escorté par les motards pour bloquer les carrefours et progresser en toute sécurité. Du boulevard de la Préfecture, on perçoit au loin le bruit des sirènes et des moteurs des tracteurs qui approchent lentement. Les puissants phares, les gyrophares et les feux de détresse illuminent la rue. Il faudra plus de 30 minutes pour parcourir les 3,5 km et faire garer tous les engins devant la sous-préfecture et dans la rue adjacente.
Soutien des habitants
En posant le pied à terre, les agriculteurs disent avoir été surpris par le nombre de personnes venues les soutenir sur leur passage, les uns en pyjama à la fenêtre filmant ou applaudissant, les autres dans la rue avec leurs enfants à la main approuvant avec le pouce en l’air. Une femme a même pris la parole devant eux à l’issue des discours pour les encourager à poursuivre leur mouvement et à nourrir la population.
A peine le moteur des tracteurs éteint que le sous-préfet se présente aux côtés des représentants de la FDSEA et de JA Loire pour échanger avec eux sur les causes de leur mobilisation et pour leur apporter son soutien. Dans le même temps, quelques agriculteurs s’emploient à dérouler une bâche et à y inscrire un slogan, avant de la tendre entre deux godets de tracteur. D’autres déposent un cercueil sur le tas de fumier, laissé devant les grilles du bâtiment de l’Etat par l’un des manifestants. La petite sono est installée, les responsables vont parler… Le silence se fait, le sous-préfet commence à prendre des notes.
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Ce type de soirée vécue par 180 agriculteurs à Montbrison l’a aussi été la veille par 80 manifestants venus avec 40 tracteurs à Roanne. Elle devrait l’être ce soir à Saint-Etienne. Lundi et mardi soir, les organisateurs se sont dits satisfaits du déroulement de la mobilisation, dans le calme et bon enfant, mais aussi de la participation. Voire même surpris, ce qui est réconfortant pour un responsable de syndicat, mais aussi inquiétant.
La goutte d’eau…
Chaque soir, les représentants de la FDSEA et de JA Loire ont pris la parole devant les troupes, mais aussi les représentants de l’Etat. Le préfet avait effectivement fait savoir qu’il irait à leur rencontre, encourageant les deux sous-préfets à en faire autant. Les responsables syndicaux sont revenus sur les raisons d’une telle mobilisation et les actions conduites dans le département comme dans l’ensemble du pays.
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« Il est hors de question que la France continue à discuter avec les pays du Mercosur, qui ne respectent pas les normes de production en vigueur chez nous, a répété Jean-Luc Perrin, président de la FDSEA. L’agriculture ne doit pas servir de monnaie d’échange. La France a le pouvoir de mettre son veto sur l’accord. » Et de poursuivre : « Le Mercosur est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Il ne faut pas oublier toutes les autres revendications que nous portons depuis trop longtemps et pour lesquelles nous n’avons pas obtenu toutes les réponses. » A savoir : bénéficier d’une juste rémunération des produits, remettre la production au premier plan (simplification administrative, conservation des moyens de production), vivre dignement son métier d’agriculteur, mais aussi faire aboutir les projets de loi d’orientation et de finances. Il était aussi question de renouvellement des générations agricoles et de gestion de la FCO (Fièvre catarrhale ovine). « Les politiques doivent prendre conscience de la situation et faire confiance au bon sens agricole, insistait Mathieu Vassel, président de JA Loire. Nous ne voulons pas attendre Noël pour avoir un joli cadeau de leur part. Les actions ne font que commencer. »
Lucie Grolleau Frécon
Les élus soutiennent le mouvement
À l'occasion de la conférence des présidents de l'Assemblée nationale le 19 novembre, la ministre des Relations avec le Parlement a proposé, dans le cadre de l'article 50-1 de la Constitution, d'inscrire à l'ordre du jour du 10 décembre un « débat » sur la négociation en cours d'un accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur. Mais le débat a finalement été avancé au 26 novembre, a annoncé lors des Questions au gouvernement Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale. « Le débat sera suivi d'un vote, a précisé le Premier ministre, qui entend faire une déclaration à cette occasion. Le vote n'engagerait pas la responsabilité du gouvernement.
Dans la Loire, lundi, les élus du Conseil départemental ont adopté, à l’unanimité, une motion relative aux négociations de l’accord de libre-échange « L’application d’un tel accord, en l’état, contraire à tous nos objectifs en matière souveraineté alimentaire et de développement durable, aggraverait considérablement les difficultés déjà rencontrées par les agriculteurs français alors qu’ils doivent relever un défi immense : celui de préserver notre capacité de production quand la moitié d’entre eux partiront à la retraite dans les toutes prochaines années. Nous essayons à tous les niveaux, de consacrer le local. Cet accord c’est tout le contraire », commentait Georges Ziegler, président du Département.