Raymond Vial
Avancer pour favoriser des exploitations compétitives, viables et vivables
Vous êtes candidat sur la liste FDSEA-JA pour l'élection à la Chambre d'agriculture. Raymond Vial. : « Est-ce parce que vous considérez qu'avec vos co-lisitiers vous n'avez pas atteint les objectifs que vous vous étiez fixés ?
Raymond Vial : « Nous n'avons pas à rougir du travail que nous avons accompli ensemble durant ce dernier mandat. Pour résumer la situation, nous sommes dans un contexte difficile où les agriculteurs, et l'agriculture en général, sont plutôt malmenés par une frange de la population, très relayée par les médias. En noircissant le tableau, les agriculteurs seraient des pollueurs, qui plus est des assistés et vivant d'expédients en provenance de l'Europe principalement. Si on ajoute à cela un revenu agricole moyen, même plutôt médiocre, tout encouragerait à baisser les bras et à laisser faire. Mais laisser faire, ça veut dire quoi ? Abandonner toute production locale et faire confiance à des Beignet, Bigard... et surtout à des importations massives à bas prix pour nourrir le pays. Ce n'est pas du tout ma philosophie et je n'ai pas, avec mes collègues colistiers, le sentiment de mener un combat d'arrière-garde en défendant avec la FNSEA et les JA une production nationale, une production locale de qualité. C'est tout le sens de mon engagement, depuis le début de ma carrière d'éleveur, chez Jeunes agriculteurs, à la FDSEA, puis à la Chambre d'agriculture, et maintenant au Conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes. Cela me donne l'occasion de dire que mon engagement en temps que simple élu au Conseil régional me permet d'expliquer et de défendre clairement la position des agriculteurs, et surtout d'être le porte-parole d'une certaine idée que je me fais de l'agriculture de production dans la grande région Auvergne-Rhône-Alpes, marquée par sa diversité. »
Vous croyez donc qu'il est possible de produire, aujourd'hui mais aussi demain, en France, en Auvergne-Rhône-Alpes et dans la Loire ?
R.V. : « Bien sûr ! Et j'en veux pour preuve que notre département affiche des performances étonnantes et dans toutes les productions : les productions animales les plus traditionnelles comme les bovins lait, bovins viande, ovins, caprins ; les productions hors-sol comme les volailles, les lapins, les porcs ; les productions végétales (céréales, arboricoles, viticoles, maraichères, etc.).
Je suis optimiste quant à l'avenir des productions agricoles. Je crois vraiment qu'il y a des places à prendre dans toutes les productions que je viens d'énumérer. C'est vrai que la tranche d'âge des baby-boomers est conséquentes et que les départs en retraite massifs effraient parfois. La désertification de nos territoires s'accompagne d'un agrandissement des fermes et des ateliers de production, et pose inéluctablement la question de la main d'œuvre disponible sur les exploitations. Dans la Loire, nous avons facilité l'installation et la transmission des exploitations, et nous nous situons aujourd'hui, en Auvergne-Rhône-Alpes, en première place. Il faut aussi savoir que 98 % des agriculteurs installés avec les aides sont encore agriculteurs dix ans après. »
Pour vous, c'est un élément de satisfaction ?
R.V. : « Bien sûr. L'esprit que nous avons insufflé montre que dans bien des domaines nos exploitations sont dynamiques et rentables. De nombreux jeunes agriculteurs se sont installés, entraînant là un dynamisme évident dans toutes nos productions. C'est un gage de réussite pour l'avenir. Que l'on produise en conventionnel ou en bio, nous sommes partout aux premières places dans notre région. Si j'en juge par l'évolution de l'histoire économique : « Qui n'avance pas recule ! » A l'inverse de certains de nos contradicteurs, je ne pense pas qu'un retour dans le passé soit la meilleure solution... Que l'Etat fixe des prix élevés pour rendre tout le monde heureux, après avoir fermé les frontières, n'est pas réaliste. Ces solutions simplistes sont dangereuses parce que totalement réfractaires à la compréhension du monde, un monde économique qui est aujourd'hui synonyme de mondialisation. Nous avons la chance, dans la Loire, par rapport à d'autres départements, de bénéficier d'outils de transformation et de commercialisation de proximité, qu'ils soient privés ou coopératifs, et ce pratiquement pour toutes les productions. Il existe une synergie naturelle pour que ces filières organisées fonctionnent dans l'intérêt bien compris de chacun des maillons de la chaine. Je sais très bien que nous n'avons pas affaire à des enfants de cœur parmi nos partenaires (clients, transformateurs, distributeurs). Même si les Etats généraux de l'alimentation peuvent nous donner quelques petits coups de pouce, c'est quand même sur nos exploitations que la bataille des coûts de production doit être poursuivie dans le but d'une plus forte valeur ajoutée pour nos produits. La Chambre d'agriculture devra, j'en suis conscient, œuvrer dans ce sens, dans ce domaine comme dans d'autres, sans perdre de vue l'amélioration de la qualité des services qu'elle doit proposer. »
Considérez-vous que vous-même et vos colistiers n'avez pas été assez persuasifs sur certains dossiers et qu'il faudra continuer à les travailler ?
R.V. : « Au cours de ce dernier mandat, l'exaspération de beaucoup d'agriculteurs, et la mienne aussi, atteint des sommets au sujet de la « contrôlite aigüe », dans tous les domaines : administration, agence pour la biodiversité, Onema, MSA, etc. Il est vraiment insupportable d'être considéré comme des délinquants, avec des risques multiples de procès verbaux, parce qu'on a gratté les bords d'un ruisseau, parce qu'on a tué un sanglier qui se nourrissait dans un silo d'ensilage de maïs, parce que le grand-père donne un coup de main à son petit-fils sur l'exploitation, et des risques de perdre les aides vitales de la Pac parce qu'on s'est trompé dans notre déclaration Pac, devenue très compliquée. Les paysans ne sont pas des boucs-émissaires. Devant l'agacement général que suscitent les contrôles, ce thème sera à travailler au cours de la future mandature, même si ce n'est pas le principal. Face à des contrôles qui peuvent être méchants ou malsains, nous devons adopter une attitude non plus défensive, mais offensive. »
Vous évoquez souvent le rôle de l'agriculture dans l'économie. Quelle place ont aujourd'hui les agriculteurs au sein des territoires ruraux ?
R.V. : « On l'a déjà évoqué, le nombre d'agriculteurs diminue, et en conséquence leur poids dans la population rurale. C'est par exemple pour cela que la Chambre d'agriculture joue un rôle important dans l'élaboration des PLU, dans le but de protéger au maximum les entreprises agricoles pour qu'elles continuent à produire sans gênes réciproques avec les habitants. Les bonnes relations avec les collectivités locales et les maires sont à conforter. »
Pensez-vous que la Chambre d'agriculture peut encore être capable d'exprimer de manière consensuelle la position d'un monde agricole qui semble divisé ? La présence de deux listes adverses à celle de la FDSEA et des JA témoigne de ces désaccords ?
R.V. : « Il peut y avoir effectivement des désaccords, même profonds, en matière de politique agricole. A la faveur de l'élection à la Chambre d'agriculture, la Confédération paysanne montre qu'elle n'a pas abandonné ses vieux démons. Quand un militant de longue date de la Loire trempe sa plume dans l'acide pour dénoncer, avec des propos violents, l'agriculture dite industrielle, sans sol, pollueuse, empoisonneuse, aux mains de l'industrie agro-chimique - les paysans de la Loire apprécieront... -, je vois que les outrances et la caricature sont toujours au rendez-vous du côté de ce syndicat. Il n'a toujours pas fait sa révolution culturelle entre le militantisme pur et dur, façon zadiste, et des positions plus nuancées et surtout plus réalistes. Je voulais aussi signaler que, cet automne, j'ai regretté que la Confédération paysanne et la Coordination rurale n'aient pas voulu participer au collectif de défense de l'élevage et de la filière viande lancé cet automne, alors même que cette action était déterminante pour l'agriculture. Et ce n'est qu'un exemple. »
Quel est l'atout, selon vous, de la liste FDSEA-JA ?
R.V. : « Cette liste témoigne d'une représentation fidèle des productions, d'hommes et de femmes de tout âge, répartis sur le département, bien implantés dans leur territoire et souvent engagés dans des actions de défense de la profession, des organisations collectives (Cuma, coopératives, service de remplacement, etc.), des associations, des mandats civiques. Pour moi, c'est un gage de compétences et de confiance pour un engagement fidèle auprès des agriculteurs et de leur famille, et pour la réussite du Projet agricole départemental : des exploitations compétitives, viables et vivables. C'est pour cela que j'invite toutes celles et ceux qui seraient encore hésitants à voter entre le 21 et le 31 janvier pour la liste FDSEA-JA. »
Propos recueillis par Lucie Grolleau Frécon