Solidarité
Développement agricole au Sénégal : un engagement associatif ligérien

Du 31 janvier au 9 février, quelques membres d’Afdi (Agriculteurs français et développement international) Loire se sont rendus au Sénégal pour leur mission annuelle d’échange et d’accompagnement des paysans locaux. Rappel du rôle de la structure et bilan des projets avec son président, Gérard Gallot.

Développement agricole au Sénégal : un engagement associatif ligérien
Parmi les projets en cours d'Afdi Loire au Sénégal, le plus récent, lancé fin 2023, est celui des moutons de case. Il consiste en l'accompagnement de femmes par l'élevage de petits troupeaux de trois à quatre moutons.

Pouvez-vous nous présenter l'association Afdi et son rôle dans la coopération agricole internationale ?

Gérard Gallot : « Afdi (Agriculteurs français et développement international) a été créé dans le département de la Loire sous le nom de Criad (Centre de relations et d’animations pour le développement) en 1974. Le premier président était Robert Duclos. Aujourd'hui, Afdi est structuré au niveau départemental, régional et national, avec une présence au sein de la FNSEA. Son initiative a pris naissance dans la Loire, notamment suite à une sécheresse dramatique au Sahel, qui a motivé sa création. Cette association se concentre sur l'échange entre agriculteurs du monde entier, avec une présence particulièrement forte en Afrique, mais aussi en Asie et en Europe de l'Est. Afdi Loire, en particulier, a un partenariat avec l’association Popkadifa dans la zone de Kaolack, au Sénégal. »

Vous revenez tout juste d'une mission là-bas, quels étaient les objectifs ?

G.G. : « Nous sommes partis du 31 janvier au 9 février avec trois membres de l'Afdi Loire et un représentant de la délégation régionale. L'objectif principal était de dresser un bilan des projets initiés ces dernières années, d'évaluer leur progression et d'échanger avec Popkadifa sur les orientations à venir. »

À quoi ressemble l’agriculture là-bas ?

G.G. : « C’est une agriculture en grande partie vivrière. À Kaolack, la zone est semi-désertique avec trois ou quatre mois de pluie, de juin à septembre. À cette période, on fait du mil, de l’arachide et des cultures vivrières, mais on récolte aussi un peu de fourrages pour les animaux. Le reste de l’année, les agriculteurs n’en sont plus vraiment, exception faite des éleveurs : ils sont artisans, commerçants ou font d’autres métiers, car c’est une agriculture relativement saisonnière. Son caractère temporaire n’aide pas à la structuration de la profession. »


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Quels sont les projets en cours ?

G.G. : « Nous en avons plusieurs, notamment les jardins maraîchers mis en place depuis 2019-2020. L'idée est de permettre aux agriculteurs de cultiver des légumes en période sèche, à des fins personnelles et commerciales. Malheureusement, nous avons constaté un manque d'activité sur certains périmètres maraîchers, en raison de problèmes d’accès à l’eau et de dégradations par les animaux. On voyait que les agriculteurs avaient baissé les bras, mais après plusieurs échanges avec eux et Popkadifa, nous avons ressenti un regain de motivation pour relancer l’initiative. Cette idée de jardins, c’est aussi une manière de maintenir les jeunes sur place. Je précise d’ailleurs que les femmes sont importantes et ont un rôle déterminant sur cette agriculture : elles sont le pilier de la famille, elles veulent nourrir les enfants, les emmener à l’école et les soigner. »

Vous avez également développé un projet autour de l'élevage ?

G.G. : « Oui, nous avons démarré un projet de moutons de case, fin 2023. Il s'agit d’accompagner des femmes à travers l'élevage de petits troupeaux de trois à quatre moutons (deux femelles et un bélier). L'objectif est à la fois économique et structurel : renforcer les capacités financières de ces femmes, leur donner accès à un suivi vétérinaire et leur permettre de développer une activité durable. Pour le moment, le projet est très encourageant, avec des bénéficiaires motivées et un réseau qui commence à se structurer. »

Vous mentionnez souvent la structuration des agriculteurs locaux. Pourquoi est-ce un enjeu central ?

G.G. : « L'objectif ultime de nos actions est que Popkadifa devienne une structure autonome, capable d’accompagner et de développer des projets de façon indépendante. La mise en place de projets concrets, comme les jardins maraîchers ou l'élevage, est un moyen de les amener à mieux s'organiser et à structurer leur activité sur le long terme. »

Vous travaillez aussi sur un projet de transformation de céréales dans la zone de Tukar. En quoi consiste-t-il ?

G.G. : « En 2020, nous avons initié un projet de transformation du mil via un moulin, destiné à l’alimentation humaine, et de l'arachide par une presse, pour en extraire de l'huile et obtenir des sous-produits pour l’alimentation des animaux. Ce projet a simplifié le travail des femmes et leur a fait gagner du temps. Mais il faut maintenant aller plus loin, peut-être en développant une activité de transformation et de commercialisation plus poussée. »

La langue constitue-t-elle un frein à vos actions sur place ?

G.G. : « Oui. Même si la langue officielle du Sénégal est le français, de nombreux agriculteurs ne le parlent pas couramment. Nous nous adressons aux responsables qui le maîtrisent, mais lorsque l'on s'éloigne, la communication devient plus difficile. Nous veillons à ce que tout soit bien traduit, mais certaines incompréhensions subsistent, parfois d'ordre culturel. »

Envisagez-vous d'intensifier la fréquence de vos missions au Sénégal ?

G.G. : « Actuellement, nous nous y rendons une fois par an, mais nous nous interrogeons sur la pertinence d’augmenter cette fréquence. Un an est une période longue, et nous réfléchissons à l’idée d’y aller tous les six mois avec des équipes plus légères, afin d’assurer un meilleur suivi. »

Quel est votre espoir pour l’avenir de ces coopérations agricoles ?

G.G. : « Nous espérons voir Popkadifa se structurer durablement et devenir un acteur fort du développement agricole dans la région. Le véritable succès serait que les agriculteurs locaux puissent mener à bien leurs projets sans notre intervention. Nos actions ne sont qu'un levier pour les aider à gagner en autonomie et en organisation. »

Axel Poulain
Agenda

Repas solidaire le 22 mars à Sainte-Agathe-la-Bouteresse

L’association Afdi Loire nécessite d’être soutenue financièrement afin que les différents programmes – en cours, à l’étude ou à venir – puissent être menés à bien et avoir un impact durable sur les communautés agricoles accompagnées. L’association est en perpétuelle recherche de dons, que ce soit de la part des organisations professionnelles agricoles, des entreprises mais aussi des particuliers sensibles aux enjeux du développement agricole international. Grâce à ces contributions, l’Afdi peut non seulement pérenniser ses actions, mais aussi les développer en fonction des besoins identifiés sur le terrain.

Ainsi, pour accompagner les différents projets et aider à structurer l’association Popkadifa, l’association organise différentes activités et animations permettant de collecter des fonds. Parmi celles-ci, la tombola organisée en 2023, dont les tickets avaient été vendus lors de la Fête du lait à Saint-Héand, ainsi que lors des Journées de la fourme de Montbrison et des côtes-du-forez. Ces initiatives permettent également de sensibiliser le public à la cause agricole et de créer un lien entre producteurs locaux et agriculture internationale.

Cette année, Afdi Loire innove avec une soirée repas-spectacle africaine, samedi 22 mars à la salle des fêtes de Sainte-Agathe-la-Bouteresse. Un événement festif et convivial, qui mêlera gastronomie et culture pour offrir une immersion au cœur des traditions africaines : « L’autre objectif est de parler de l’Afrique, et même de l’agriculture d’ailleurs, en France. On a tendance à regarder notre nombril et pas vraiment ce qu’il se fait plus loin », précise Gérard Gallot.

Au menu, après un apéritif comprenant un kir ou un jus de fruit au choix, les participants pourront déguster un yassa au poulet, un plat emblématique au Sénégal préparé pour l’occasion. La suite du repas mettra également en avant la production locale avec la fourme de Montbrison, en clin d’œil à l’ancrage de l’événement dans le Forez. « C’est aussi cela l’agriculture, c’est le mélange des cultures et des savoir-faire », s’enthousiasme son président. Enfin, le dessert sera un gâteau coco, une spécialité africaine qui viendra conclure ce repas.

Mais cette soirée ne s’arrêtera pas à la gastronomie : une animation musicale l’agrémentera avec la venue d’un groupe burkinabé composé de musiciens et de danseurs. Une opportunité de s’immerger dans la culture africaine et de célébrer les liens de solidarité qui unissent les agriculteurs d’ici et d’ailleurs. « Les fonds récoltés seront reversés aux actions d’Afdi au Sénégal. On souhaite que le maximum de personnes nous rejoigne pour cette soirée, venez donc nombreux ! »

Pour réserver votre participation à cet événement, il est possible de se rendre sur la plateforme Helloasso ou directement au siège de la FDSEA 42. Les tarifs sont fixés à 25 euros par adulte et 15 euros pour les enfants de moins de 12 ans. Gérard Gallot insiste par ailleurs sur l’importance de ces initiatives et sur la nécessité de mobiliser un large public : « J’ai le sentiment qu’aujourd’hui, on a tendance à se renfermer sur soi. J’espère et je souhaite donner envie à certaines personnes d’aider des agriculteurs d’une autre région du monde pour qu’ils puissent vivre dignement de leur métier. Et puis, il faut apprendre à se connaître et connaître les autres, l’échange est important. »

Afdi Loire comprend une petite vingtaine de bénévoles particulièrement investis dans les missions de coopération agricole et de solidarité internationale. Elle bénéficie du soutien des organisations professionnelles du département (Chambre d’agriculture, FDSEA, JA, etc.), mais reste tributaire de l’engagement et de la générosité du grand public pour poursuivre son action. Cet événement est une occasion idéale de contribuer à cette cause, tout en profitant d’une soirée placée sous le signe de la découverte et du partage.